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Bienheureux Jacques de Voragine |
Dernière mise à jour le 30/11/2023 Plan du site Menu en haut d’écran Aide |
Fête | 13 juillet (fête locale) |
Bienheureux Jacques de Voragine |
Sa vieJacques de Voragine est né entre 1228 et 1229 à Varazze ou, plus probablement, à Gênes, où est attestée la présence d’une famille originaire de Varazze, appelée « de Varagine ». La formule « de Voragine » par laquelle il est parfois désigné dans les sources anciennes est une variante de « da Varagine ». L’idée remontant au XVIe siècle, devenue ensuite traditionnelle, selon laquelle « Voragine » vient de « vorago », pour indiquer l’abîme de connaissance dont Jacques a fait preuve dans ses œuvres est donc extravagante, même si elle exprime une certaine vérité. C’est Jacques lui-même qui fournit, dans une rapide autobiographie contenue dans l’une de ses œuvres, la Chronica civitatis Ianuenses, les premières dates certaines de sa vie :
Entre-temps, il continua à maintenir de forts liens avec la cité de Gênes. Le jour de Pâques 1283, comme il le raconte lui-même dans son opuscule Historia reliquiarum que sunt in monasterio sororum Sanctorum Philippi et Iacobi, il fit transporter une précieuse relique, la tête d’une des vierges de Sainte-Ursule, de Cologne au couvent des sœurs dominicaines de Gênes des saints Jacques et Philippe. Il s’agit du même couvent auquel quelques années plus tôt, durant son précédent priorat, il avait donné une autre relique, le doigt de saint Philippe, qu’il avait lui-même détaché de la main du saint conservée dans le couvent de Venise. À cette occasion Jacques, après la procession solennelle, a donné une messe et un prêche au peuple. En 1288, alors qu’il n’était plus depuis deux ans prieur de la Lombardie, il fut candidat à la charge d’archevêque de Gênes, mais n’obtint pas, comme les trois autres candidats, la majorité des voix. Le pape Nicolas IV suspendit la nomination, confiant cependant à Jacques, le 18 mai de la même année, la tâche d’absoudre en une cérémonie publique, qui se tint dans l’église de Saint-Dominique, les Génois excommuniés pour avoir eu des rapports commerciaux avec les Siciliens, eux-mêmes excommuniés à cause de la guerre des Vêpres. La même année, il fut nommé diffinitor au chapitre général de Lucques. En 1290, à l’occasion du chapitre général de Ferrare, Jacques résista aux pressions des cardinaux romains qui, dans une lettre, demandaient la démission du maître général Munio de Zamora, mal vu pour son rigorisme à l’intérieur de l’Ordre et de la Curie romaine. La lettre n’obtint aucun effet : non seulement le maître général ne démissionna pas, mais il fut soutenu par une déclaration publique, signée aussi de Jacques, qui exaltait sa vertu et approuvait sa politique. Selon la reconstruction de Gerolamo Borsello (XVe s.) et, après lui, selon d’autres biographes anciens, ce serait justement à cause de ce soutien donné à la ligne rigoriste de Munio de Zamora que Jacques aurait subi cette année une tentative d’homicide de la part de confrères qui voulaient le jeter dans le puits du couvent de Ferrare. Une tentative qui, raconte encore Borselli, se serait répétée l’année suivante, en 1291, à Milan, cette fois parce que Jacques avait exclu du chapitre provincial frère Stefanardo, prieur du couvent milanais. Rien ne confirme la véracité de ces deux épisodes. En 1292, il fut nommé par le pape Nicolas IV archevêque de Gênes. Jacques consacra les six dernières années de sa vie à gouverner le diocèse génois, de 1292 à 1298, année de sa mort. Son action s’est tournée d’abord vers la réorganisation législative du clergé sous l’autorité archiépiscopale. Dans ce but, il convoqua un concile provincial, qui se tint dans la cathédrale Saint-Laurent en juin 1293. Comme le raconte Jacques lui-même dans la chronique de Gênes, une reconnaissance des os de san Siro, patron de la cité, qui confirmait solennellement l’authenticité de la relique fut accomplie en présence des gouvernants et des notables puis de tout le peuple pendant ce concile. L’activité de Jacques est intense sur le plan politique, il en offre lui-même un ample compte-rendu dans la Chronique de Gênes. En 1295, dans les premiers mois de l’année, il promut la pacification entre les factions de la cité et célébra la paix finalement obtenue dans une assemblée publique lors de laquelle il prêcha et entonna, avec ses ministres, les louanges à Dieu ; suivit ensuite une procession solennelle à travers les rues de la cité, guidée par ce même Jacques à cheval qui se conclut avec la remise de l’insigne de miles au podestat de Gênes, le milanais Jacques de Carcano. La même année, en avril, avec les ambassadeurs envoyés par la Commune, il accomplit un voyage à Rome, convoqué par le pape Boniface VIII qui cherchait à prolonger l’armistice entre Gênes et Venise. Le séjour à la Curie romaine se prolongea une centaine de jours, et Jacques ne manqua pas de montrer une certaine fatigue face à l’indécision du pape et surtout face aux manœuvres dilatoires des ambassadeurs vénitiens. À ce point les Génois, après la longue attente, décidèrent d’aller à l’affrontement contre Venise, réunissant, dans l’enthousiasme populaire, une flotte qui aurait dû affronter les ennemis dans une bataille décisive près de Messine, à laquelle cependant les Vénitiens ne se présentèrent pas, contraignant le commandant Oberto Doria à retourner à Gênes sans avoir combattu, accueilli cependant en triomphe par la cité et par son évêque. À la fin de 1295, Jacques subit un revers politique et une profonde déception personnelle : en effet, la paix entre les factions citadines se rompit, cette paix qu’il avait voulue et solennellement célébrée quelques mois plus tôt. Des incidents violents éclatèrent, durant lesquels la cathédrale Saint-Laurent fut incendiée, et son toit fut totalement brûlé. Les dommages furent si importants que Jacques demanda au pape une aide, qui lui fut accordée le 12 juin 1296. Jacques mourut dans la nuit du 13 au 14 juillet 1298. Son corps, d’abord enseveli dans l’église Saint-Dominique du couvent des frères prêcheurs de Gênes, fut, à la fin du XVIIIe siècle, transféré dans une autre église dominicaine, Santa Maria di Castello, où il se trouve encore. En vertu de la vénération et du culte dont il fut l’objet pendant des siècles, Jacques a été béatifié en 1816 par le pape Pie VII. Les œuvresImportant pour son rôle à l’intérieur de l’Ordre des frères prêcheurs et par son action comme archevêque de Gênes, Jacques de Voragine est connu avant tout pour ses œuvres listées dans l’ordre selon lequel Jacques lui-même les cite dans le dernier chapitre de la Chronica civitatis Ianuensis :
Legenda aureaIl s’agit de la première et de la plus fameuse œuvre de Jacques de Voragine. Le titre de Legenda aurea, sous lequel elle a été traditionnellement transmise, n’apparaît pas dans les manuscrits les plus anciens qui mentionnent à la place le titre de Legende sanctorum, celui-là même avec lequel Jacques désigne l’œuvre dans le passage de la Chronica rappelé plus haut. Les autres titres sous lesquels l’œuvre est désignée, Liber passionalis, Vitae ou Flores ou Speculum sanctorum, Historia Lombardica ou Longobardica (d’après l’avant-dernier chapitre, dédié au pape Pélage, où sont racontés les principaux événements survenus de l’arrivée des Lombards en Italie à 1245) n’appartiennent pas non plus à la tradition la plus ancienne du texte. L’œuvre se compose de récits dédiés aux vies des saints et aux fêtes liturgiques (178 selon l’édition Maggioni, 182 selon l’édition Graesse), disposés, et cela constitue une innovation au regard des œuvres du même genre, selon l’ordre du calendrier liturgique. Les saints, dont on raconte la vie, appartenaient tous aux premiers siècles du christianisme, à l’exception de six saints « modernes » : deux du XIIe siècle, Bernard de Clairvaux et Thomas Beckett, quatre du XIIIe, Dominique, François, Pierre Martyr, Élisabeth de Hongrie. L’œuvre appartient au genre des legendae novae, compilations préparées entre le XIIIe et le XIVe siècle le plus souvent par des représentants de l’Ordre des frères prêcheurs, dans lesquelles, avec la double intention de mettre à disposition des prédicateurs un matériau qui serait sans cela trop abondant et diffus et d’offrir à la lecture des textes qui soient en même temps plaisants et édifiants, étaient recueillis et condensés les récits hagiographiques qui s’étaient accumulés en grand nombre depuis les premiers siècles de l’ère chrétienne. La Legenda aurea a été écrite par Jacques à partir de 1260 et ensuite retravaillée par lui, alors qu’en circulaient déjà les premières versions, par étapes jusqu’à peu avant sa mort, comme l’a démontré Giovanni Paolo Maggioni dans son édition de l’œuvre. Dans la première rédaction prévaut la volonté de Jacques de préparer un instrument utile à la prédication. Ensuite, l’insertion de quelques récits montre de la part de Jacques la volonté de tenir compte des exigences d’un public de lecteurs certes dévôts, mais aussi cultivés et intéressés. Les sources de la Legenda aurea sont multiples :
La Legenda eut un succès rapide, durable et étendu à toute l’Europe comme aucun autre texte à l’époque médiévale, à part la Bible. En témoigne
L’édition par Theodor Graesse (Dresde 1846, reproduction anastatique de l’édition Dresden-Leipzig 1890, Onasbrück 1969), basée sur une des premières éditions imprimées, celle de Drese 1472, rend compte du texte vulgaire de la Legenda qui s’est constitué durant les deux siècles de sa diffusion maximale. L’édition plus récente de Giovanni Paolo Maggioni (2 vol. Florence, 1998, qui a été suivie, en 1999, d’une seconde édition revue par l’éditeur avec un CD-ROM attaché, contenant le texte de la Legenda, par L. G. G. Ricci) présente l’ultime rédaction de l’auteur de l’œuvre. Elle est basée sur deux manuscrits (Milan, Ambr., C 240 sup. et Milan, Ambr., M 76 sup.) identifiés parmi les 70 manuscrits les plus anciens comme des témoins de l’ultime rédaction réalisée par Jacques sur le texte. Le succès de la Legenda ne s’est pas terminé avec le Moyen Âge, même si le jugement négatif des humanistes et des réformés a contribué à son déclin comme texte religieux dans la prédication comme dans la dévotion privée. Reste cependant le plaisir de la lecture que le récit hagiographique de Jacques a su offrir et qui en a garanti la fortune jusqu’à nos jours : nombreuses sont les traductions dans toutes les principales langues modernes, et nombreuses sont aussi les œuvres théâtrales, musicales, figuratives inspirées par elle. Rappelons les deux plus récentes traductions intégrales en italien et en français, réalisées sur le texte de l’édition de Graesse, par Alessandro et Lucetta Vitale Brovarone (Torino 1995) et par une équipe dirigée par Alain Boureau et Monique Goullet (Paris 2004). Les recueils de sermonsJacques a écrit trois recueils de sermons modèles, les Sermones de sanctis et festis, les Sermones de tempore, les Sermones quadragésimales. Chaque sermon est développé selon la technique du sermo modernus : il donne un thema initial, toujours constitué par un passage scripturaire, suit une division qui sépare les parties du sermon, qui sont en général au nombre de trois, mais le nombre peut varier selon les cas de deux à huit ; chaque partie peut à son tour être sujette à des divisions spécifiques et plus ou moins étendues, à l’intérieur desquelles on trouve placés des passages scripturaires, des auctoritates, des métaphores, des étymologies, des insertions doctrinales, hagiographiques, liturgiques. Si la technique est la même dans tous les sermonnaires, toutefois dans le De sanctis les modèles apparaissent plus schématiques, tandis que dans le De tempore et ensuite, encore plus, dans les Quadragésimales les plans se font plus articulés et plus riches de contenu. Les modèles de sermons de Jacques sont caractérisés, outre un certain caractère schématique comme on l’a dit,
Les dates de composition sont incertaines. L’ordre de composition des trois sermonnaires est probablement celui selon lequel Jacques les liste dans la Chronica, c’est-à-dire De sanctis, De tempore et Quadragesimales. Puisque le premier sermonnaire, le De sanctis, a été composé après la rédaction de la Legenda aurea, comme on le lit dans le prologue présent dans certains manuscrits, et le dernier, le Quadragesimale, pourrait avoir été porté à terme en 1286, comme il apparaît dans le colophon des manuscrits de l’aire anglaise (« expliciunt sermones fratris Ianuensis ordinis praedicatorum compilati anno Domini MCCLXXXVI »). On peut supposer que dans l’ensemble les trois recueils ont été écrits après 1267, c’est-à-dire la première rédaction de la Legenda, ou peut-être après 1277, c’est-à-dire après la fin du premier provincialat, comme beaucoup de biographes sont portés à le croire, et pas après 1286. Les trois sermonnaires eurent un extraordinaire succès, comme en témoigne le grand nombre de manuscrits restants, plus de 1120. Un nombre qui fait des sermonnaires de Jacques de Voragine les sermonnaires médiévaux dont nous sont parvenus le plus de manuscrits. Les Sermones de sanctis et festisLes Sermones de omnibus sanctis et festis comprennent 305 sermons dédiés aux saints et aux fêtes liturgiques. À chaque saint ou fête sont dédiés de deux à neuf sermons. Dans la Chronica, Jacques déclare avoir écrit deux volumes de ces sermons, un plus ample, celui qui nous est parvenu, l’autre plus bref, dont on n’a pas connaissance. Les saints et les fêtes sont listés selon l’ordre du calendrier ecclésiastique déjà adopté dans la Legenda aurea, en nombre cependant réduit : des 178 chapitres de la Legenda plus de cent ne sont pas repris dans les Sermones, pour la plupart ceux dédiés à des saints « mineurs » des premiers siècles, martyrs et moines. Nombreux sont les extraits repris de la Legenda et présentés dans les Sermones sous une forme résumée et moralisée. L’œuvre se présente en effet comme la transposition sous forme de sermon du matériau hagiographique recueilli dans la Legenda. Jacques lui-même, dans le prologue, reconnaît avoir écrit le De sanctis à la suite des sollicitations de ses confrères qui avaient lu et apprécié la Legenda aurea. Le succès du recueil est attesté par plus de 300 manuscrits, et par les éditions, qui se sont succédé de façon ininterrompue du XVe au XIXe siècle à partir de l’editio princeps de Cologne 1478 (pour la liste des manuscrits, voir Schneyer, III, pp. 266-268 ; Kaeppeli-Panella, II, n. 2155, pp. 359-61 et IV, p. 141). L’édition des Sermones de sanctis par Giovanni Paolo Maggioni est sous presse à la Sismel — Editions del Galuzzo. Pour le texte et les problèmes liés à l’édition, voir le matériau recueilli par Giovanni Paolo Maggioni sur le site ephilology.org. Les Sermones de temporeLe deuxième recueil, connu sous des titres variés (Sermones de omnibus evangeliis domenicalibus, selon l’indication de Jacques lui-même, ou Sermones de tempore per annum, Sermones dominicales, Sermones festivales), comprend 160 modèles de sermons, trois pour chaque Évangile du dimanche. Cette œuvre également écrite, comme le déclare Jacques dans le prologue, sur la sollicitation de ses confrères (« importuna fratrum instantia ») est dédiée à la Trinité, à la Vierge Marie et à saint Dominique, à l’intercession duquel il se recommande pour la bonne diffusion de l’œuvre. Dans ce cas aussi on compte énormément de manuscrits, plus de 350, et de nombreuses éditions qui suivent la princeps de Cologne 1467-69 (voir Schneyer, IIII, 233-235 ; Kaeppeli-Panella, II, n. 2156, pp. 361-364 et IV, p. 141). Pour confirmer la fortune séculaire du recueil, signalons une traduction italienne éditée à Milan chez Fabiani en 1913-1914 sous le titre Sermoni domenicali. les Sermones quadragésimalesLes Sermones quadragésimales comprennent 98 modèles de sermons prêchables durant la période de Carême (deux pour chaque feria). L’édition disponible depuis peu, réalisée par Giovanni Paolo Maggioni (Sismel - Edizioni del Galluzzo, Firenze 2004), est basée sur six témoins des principales aires de diffusion du texte (aire italienne, germanique et britannique) : Firenze, Laurenz., Acq. e Doni 344 ; Graz, Universitätbibl., 1472 ; London, Lambeth Palace Library, 23 ; München, Bayerische Staatsbibl., clm 18850 ; Tosi, Bibl. Com., 142 ; Würzburg, Universitätbibl., M.p.th.f. 54. Les manuscrits appartiennent tous au XIIIe siècle à l’exception du témoin anglais, remontant aux ultimes décennies du XIVe siècle, le plus ancien de la famille insulaire, la seule caractérisée par la datation 1286, présente dans l’explicit. L’édition, bien que constituant, comme l’affirme son éditeur, une sorte de prolegomena à une future édition définitive, représente une avancée notable par rapport aux éditions précédentes et parvient à certaines conclusions : la confirmation que Jacques s’est servi de florilegia pour les citations des auctoritates, l’hypothèse, hautement probable, que le texte est le fruit d’une unique rédaction, la certitude que les deux sermons finaux présents dans de nombreuses éditions, le Sermo de Passione Domini et le Sermo in planctu Beatae Virginis Mariae, n’appartiennent pas au recueil original et ne sont donc pas authentiques. Comme les autres recueils, les Sermones quadragésimales ont eu aussi un extraordinaire succès, attesté par plus de 300 manuscrits et de nombreuses éditions du XVe au XIXe siècle, suite à la princeps de Brescia 1483. Pour la liste des manuscrits, voir l’Appendice à l’édition Maggioni qui reprend et complète les listes de Schneyer (III, pp. 244-246) et Kaeppeli-Panella (II, n. 2157, pp. 364-367 et IV, p. 141). Le Liber MarialisLe Liber marialis a aussi été considéré pendant longtemps comme un recueil de sermons, comme en témoigne, par exemple, le titre Sermones aurei de Maria virgine Dei matri, présent dans l’édition Venise 1590 et la récente inclusion dans le Repertorium des sermons de Schneyer. En réalité, le Liber marialis est certainement un texte composé à l’usage des prédicateurs, mais pas un recueil de sermons. Il s’agit d’un opuscule, comme l’écrit Jacques lui-même dans le prologue, en l’honneur de la Vierge, qui présente une liste, par ordre alphabétique, des termes qui illustraient les caractéristiques, les fonctions, les images, les vertus qui lui étaient traditionnellement attribuées. Les termes listés sont au nombre de 160, d’Abstinentia à Vulnerata, en passant par Ancilla, Assumptio, Aurora, Conceptio, Domus, Fides, Gaudium, Humilitas, Ignis, Luna, Lux, Mater, Mediatrix, Palma, Regina, Requies, Salutatio, Stella, Templum, pour ne retenir que quelques exemples. Chacun de ceux-ci constitue le point de départ d’un traitement schématique qui rappelle fortement le style d’exposition des sermons. Dans ce cas aussi, on part d’une distinction en plusieurs points, dans laquelle se trouvent placés des passages de l’Écriture, des citations d’auctores, d’autres distinctions, des métaphores. Jacques, dans le prologue, déclare avoir composé l’œuvre à un âge avancé, lorsque, archevêque de Gênes, il s’est senti désormais proche de la mort et a voulu se remettre à la tutelle de la Vierge. La date de composition de l’œuvre doit donc être placée entre sa nomination à l’archiépiscopat, en 1292, et sa mort, en 1298. Bien qu’il soit moins important que les autres œuvres, le Liber marialis a connu aussi une certaine fortune au Moyen Âge et dans les siècles suivants. On compte environ soixante-dix manuscrits et, à partir de celle d’Hambourg 1491, beaucoup d’autres éditions du XVe au XIXe siècle (voir Schneyer, III, p. 283 et Kaeppeli-Panella, II, n. 2158, pp. 367-368). Récemment, une traduction en langue italienne (Iacopo da Varagine, Mariale aureo, versione italiana, introduzione e dizionario di Valerio Ferrua, EDB, Bologna 2006). La Chronique de GênesLa Chronica civitatis Ianuensis ab origine urbis usque ad annum MCCXCVII est la dernière œuvre de Jacques, écrite à partir de 1295 ou du début 1296, jusqu’à 1298, année de sa mort, c’est-à-dire durant les dernières années de son mandat archiépiscopal à Gênes. Le texte se divise en douze parties : les cinq premières traitent de la fondation de la cité, des premières phases de son histoire, des origines de son nom, de la conversion au christianisme et de son développement progressif jusqu’à l’année 1294. Suivent quatre parties qui constituent une sorte de traité politique sur la nature et la typologie du gouvernement séculier et ses modèles du rector et du civis chrétien. Trois parties viennent conclure l’œuvre, la première dédiée à la transformation de Gênes de siège épiscopal en siège archiépiscopal, les deux autres au passage en revue, par ordre chronologique, des évêques et des archevêques et des principaux événements arrivés à Gênes et dans le monde durant leur mandat. La narration se conclut avec une sorte de petite autobiographie de Jacques, et avec le récit jusqu’en 1297 des événements arrivés dans les années de son mandat d’archevêque dans la cité. Comme on le voit, il s’agit d’un texte « composite », inspiré par divers styles d’écriture : l’éloge des laudes civitatum, la narration des chroniques universelles, le compte-rendu des événements selon les modules de l’histoire analytique, le discours doctrinal et normatif des specula. Les objectifs de l’œuvre sont également divers : souligner le lien entre histoire citadine et action épiscopale, proposer une idée « augustinienne » de l’histoire humaine comme scénario de l’action salvatrice de Dieu, et, en général, « instruire et édifier », comme l’écrit Jacques lui-même dans le prologue. Dans ce but, Jacques ne se limite pas à alterner le récit des événements avec des considérations de caractère doctrinal et moral, mais consacre la partie centrale du texte à l’exposition d’un véritable speculum civitatis dans lequel, à l’intérieur d’un discours qui ne se s’adresse plus seulement aux Gênois, mais qui acquiert une valeur universelle, sont analysées et évaluées les diverses formes du gouvernement séculier, sont montrées les qualités du bon rector et de ses consiliarii, sont indiqués les devoirs du bon citadin dans ses rapports avec les gouvernants, sa femme, ses fils et ses serviteurs. Le but didactique et d’édification de l’œuvre la rend très voisine des textes pour la prédication : ce n’est pas un hasard si Jacques insère de longs extraits de la Legenda aurea ou des sermonnaires, ce n’est pas un hasard si le texte a été de fait utilisé comme un support pour la prédication, comme le démontre la présence dans la tradition manuscrite d’index thématiques alphabétiques, instruments typiques de consultation pour les prédicateurs. Les sources de la Chronica sont elles aussi en grande partie communes aux autres œuvres pour la prédication : à côté de sources historiques spécifiques, comme par exemple les Annali di Caffaro, relatives à l’histoire de Gênes, nous retrouvons en fait cet ensemble varié d’auctores déjà utilisé pour la compilation de la Legenda et des sermonnaires. Il faut signaler aussi l’utilisation du De regno de Thomas d’Aquin, en particulier en ce qui concerne l’analyse des diverses formes de gouvernement, étant bien entendu qu’il existe une distance entre la conception politique de Jacques et celle du théologien dominicain. La Chronica a eu une certaine fortune au Moyen Âge et dans les siècles suivants, même si elle est mineure comparée aux autres œuvres de Jacques : on compte 44 manuscrits (voir Monleone, I, pp. 351-509 avec l’intégration de Kaepelli-Panella, II, p. 368) et une édition partielle réalisée par Ludovico Muratori (Rerum Ital. Script., IX, Mediolani 1726, coll. 1-56). L’édition critique est de Giovanni Monleone (Fonti per la storia d’Italia, Roma 1941), qui a fait précéder le texte par une étude introductive sur la vie de Jacques et ses œuvres, jusqu’à aujourd’hui un point de référence fondamental. L’édition Monleone, outre le fait de mettre à disposition une version critiquement fiable de la Chronica, a le mérite d’avoir confirmé le caractère tout à fait particulier de l’œuvre de Jacques à l’intérieur du genre des chroniques, la soustrayant aux jugements impitoyables sur sa fiabilité comme œuvre historique que beaucoup dans le cours des siècles, parmi lesquels Coluccio Salutati et Muratori, lui avaient réservée. Récemment, Stefania Bertini Guidetti a fourni une traduction intégrale de la Chronica en langue italienne (ECIG, Genova, 1995), précédée d’un réexamen critique de l’œuvre en rapport avec l’histoire de Gênes et l’action pastorale et politique des frères prêcheurs. Autres opuscules hagiographiquesJacques a écrit, en outre, quelques opuscules de caractère hagiographique qui sont traditionnellement retenus comme authentiques. Certains sont mentionnés par Jacques lui-même dans plusieurs passages de la Chronica, d’autres lui sont attribués dans les manuscrits et semblent par le style très proches de la Legenda aurea. Trois concernent des saints et des reliques liés à l’histoire de Gênes : la Legenda seu vita sancti Syri episcopi Ianuensis, écrite en 1293 (le texte, qui correspond au chapitre dédié à san Siro dans l’une des ultimes révisions éditoriales de la Legenda aurea, a été publiée en 1874 par Vincenzo Promis comme une œuvre autonome dans Leggenda e inni di san Siro vescovo di Genova, dans Atti della Società ligure di storia patria, X, pp. 357-383) ; l’Historia reliquiarum que sunt in Monasterio SS. Philippi et Iacobi de Ianua, probablement composée entre 1286 et 1292, et l’Historia translationis reliquiarum Sancti Iohannis Baptistae Ianuam, rédigée entre 1296 et 1298 (toutes deux publiées dans Due opuscoli di Jacopo da Varagine, ed. a cura di A. Vigna e L. T. Belgrano in Atti della Società ligure di storia patria, X, pp. 465-479 e pp. 480-491). Le Tractatus miraculorum reliquiarum Sancti Florentii et l’Historia translationis reliquiarum eiusdem, composés probablement entre 1281 et 1285, sont contenus dans le manuscrit Fiorenzuola d’Arda, Bibl. Parrochiale (sec. XV), ff. 33r-53v (traduction italienne dans G. Bonnefoy, San Fiorenzo vescovo di Orange, Roma 1945, pp. 108-126 ; pour la bibliographie sur ce manuscrit et sur l’œuvre voir Kaeppeli-Panella, II, p. 369). La Passio sancti Cassiani a été écrite par Jacques en 1282 sur la requête de l’évêque d’Imola, Sinibaldo de’Milotti, qui avait consacré en 1271 la nouvelle cathédrale de la cité à saint Cassien (Bibliotheca Hagiographica Latina, 1635b-c). |